Les pousses de bambou et leur utilisation
Mettre à jour: 14 Juillet 2016
Le Vietnam relève de la civilisation du riz dont l’habitat en général coïncide avec celui du bambou. Il est donc naturel que nombre de proverbes, dictons et chansons populaires fassent allusion aux pousses de bambou, qui accompagnent le riz.

La pousse de bambou (măng en vietnamien) est la jeune tige, la bouture de cette graminée arborescente. La pousse d’été est appelée măng chiêm et celle d’automne, măng mùa. Il existe aussi deux variétés traditionnelles de riz, le riz d’été (lúa chiêm) et d’automne (lúa mùa). Les Vietnamiens rapprochent l’asperge de la pousse de bambou et l’appellent «pousse de bambou occidental» (măng tây), du fait de sa ressemblance au niveau couleur et consistance. On compare les mains graciles des femmes à la gaine conique de la pousse de bambou (bàn tay búp măng). Un œil frappé de cataracte est décrit comme «œil ayant des pousses de bambou» (mắt có măng) ou «avec des écailles de poisson» (mắt có vây cá).

Image de l’enfance et de la jeunesse

En général, la pousse de bambou est associée à l’enfance. C’est ainsi que le măng sữa (pousse de bambou à allaiter) ou măng non (pousse de bambou auquelle il faut donner du riz mâché) désigne l’enfant, de même que tuổi măng sữa signifie l’âge tendre. L’Association des pionniers a comme emblème măng non (jeune pousse de bambou). L’éducation traditionnelle insiste sur la nécessité de former l’enfant dès son âge le plus tendre, en citant le proverbe «Măng chẳng uốn, uốn tre sao được !» (Si on ne redresse pas la pousse, comment pourra-t-on relever le bambou !). L’expression «Măng mọc quá bờ» (Pousses de bambou qui dépassent la haie) fait allusion à l’enfant insoumis ou à celui qui excède les limites de son pouvoir.

La pousse de bambou rappelle la fuite du temps. Que celles qui refusent les partis convenables réfléchissent au proverbe «Măng mọc có lứa, người ta có thì» (Il y a une saison pour les pousses de bambou, il y a un temps pour la jeune fille). Pour attirer l’attention sur la rapidité du passage de l’enfance à la jeunesse, on chante :

«Khi đi trúc chửa mọc măng
Khi về trúc đã cao bằng ngọn tre»


(Quand je partais, le bambou-ivoire n’avait pas encore de pousse
À mon retour, il a déjà atteint la cime du gros bambou)


L’adage «Tre già măng mọc» (Quand le bambou se fait vieux, la pousse croît) se prête à plusieurs interprétations :

1. Les jeunes prennent la relève des vieux.

2. La vieille génération prend soin de la plus jeune (le vieux bambou, fortement enraciné, nourrit les pousses par sa sève).

3. Entraide mutuelle entre générations et absence de conflit. Rien n’est plus tragique que le spectacle «Tre già khóc măng» (Vieux bambou pleurant ses pousses), de vieux parents, déplorant la perte d’un enfant.

L’expression «Mượn gió bẻ măng» (Profiter du déchaînement du vent pour arracher les pousses de bambou) est employée pour évoquer un profiteur.

Un plat prisé dans la cuisine

Mais c’est dans le domaine culinaire que la pousse de bambou se rencontre le plus souvent. Les plus savoureuses sont les măng mai (pousse d’espèces du genre Sinocalamus) et măng trúc (genre Phyllostachys) ; les plus communes sont măng tre (Bambusa Schereb, Bambusa blumeana Schultes) et măng nứa (Neohouzeaua Camus). Măng tre, très répandue, est employée en cuisine sous trois formes :

1. Măng tươi (Fraîche) : macérée dans l’eau pendant plusieurs jours pour diminuer son degré d’acidité, elle est cuite avec de la viande ou du poisson.

2. Măng chua (Fermentée) dans l’eau pour donner une saveur aigre, elle est cuite avec de la viande ou du poisson (bouillie, frite...).

3. Măng khô (Séchée) au soleil, elle peut être conservée pendant des années.

Avant de préparer les mets, il faut la bouillir longuement. On la fait cuire ensuite avec du porc ou du poulet. Le ragoût de porc gras cuit à petit feu avec des pousses de bambou séchées est un plat classique des festins traditionnels. Par contre, le bouillon maigre de pousse de bambou avec des morceaux de n’importe quelle viande améliore l’ordinaire du paysan. La pousse de bambou sauvage, d’un goût amer, était l’ordinaire des soldats en garnison à la frontière (chanson populaire). Elle était aussi le plat des combattants lors des deux dernières guerres nationales.
 

CVN