Connue pour sa
bataille mythique, cette cité offre aussi un aperçu du Vietnam authentique,
alliant la beauté de sa campagne à la sympathie de ses habitants.
Aux confins de
la Chine et du Laos, sur une immense plaine encerclée de montagnes brumeuses,
trône fièrement la célèbre Dien Bien Phu. Tout autour, des rizières aux formes
ondulées dans lesquelles les paysans s’affairent en compagnie de leurs bœufs,
leurs traditionnels chapeaux pointus sur la tête. L'image, pittoresque, semble
tout droit sortie d’un film et, pour un peu, on s’attend presque à entendre
siffler les bombes ou voir un hélicoptère américain débarquer en trombe. Mais
ici, ce sont surtout les Français que l’on se souvient avoir combattu. C’était
en 1954, lorsque le Viet-Minh, emmené par Hô Chi Minh, arracha l'indépendance
du pays au terme de 57 jours de siège.
Petite ville
tranquille de province, Dien Bien Phu n’est pas une destination prisée. Les
rares Occidentaux qui y séjournent n'y font qu'une escale avant de passer la
frontière vers le Laos, ouverte il y a seulement quelques années. D’autres font
une boucle vers Sapa, la très touristique station d’altitude, située plus au
nord. Souvent considérée par les voyageurs comme une étape sans grand intérêt,
Dien Bien Phu mérite pourtant qu’on lui laisse sa chance.
Si elle n’a rien d’exceptionnel à offrir au niveau architectural, elle ne
manque pourtant pas de charme, entre ses grandes avenues ombragées, ses larges
esplanades et ses nombreux coins de verdure où se promener. Mais surtout, ses
habitants ont cette chaleur des endroits peu fréquentés.
Au coucher du
soleil, on y jouit d’une vue splendide sur les environs dans une lumière
magique. Le soleil n’est plus qu’une boule de feu sur le point de disparaître
derrière les cimes des montagnes aux reflets bleus. De là , on se rend compte Ã
quel point les rizières sont situées aux portes de la ville.
Plus qu’un
mémorial, l’endroit semble être le point de rendez-vous des habitants de tous
âges en fin de journée. De jeunes enfants qui font du vélo, des couples qui
flirtent sur les bancs ou encore des retraités qui viennent exercer leur «
tai-chi ».
Pèlerinage
historique
La destination de
Dien Bien Phu tient à sa position naturellement stratégique. C’est au centre de
cette immense plaine fertile, grenier à riz du Viet-Minh, que les généraux
français choisirent de s’installer pour forcer la guérilla indépendantistee Ã
les attaquer à découvert. Un plan qui avait déjà fonctionné à maintes reprises.
Mais c’était sans compter la détermination des Vietnamiens qui changèrent de
stratégie et réussirent ce que les Français jugeaient impossible. Pendant des
mois, à dos d’homme et à vélo, ils montèrent des armes lourdes dans les
montagnes encerclant la plaine, avant d’entamer un bombardement intensif. La
surprise est totale, les Français sont pris à leur propre piège. Une défaite
lourde de conséquences car elle mena à la fin de l’Indochine française, planta
les germes de la guerre contre les Américains et inspira des mouvements
révolutionnaires anticolonialistes dans le monde entier.
La plupart des
sites historiques sont facilement accessibles à pied. Le long de l’artère
principale, on peut visiter le dernier retranchement français, un bunker
détruit par une tonne de TNT à la fin de la bataille. Un peu plus loin, le
Musée de la Victoire retrace les années de lutte pour l’indépendance. En face,
le cimetière vietnamien rend hommage aux « jeunes héros morts pour la patrie ».
La journée peut
se terminer par l’aéroport, situé à quelques minutes du centre-ville. Centre
nerveux du ravitaillement français, il fut détruit dès les premiers
bombardements et reconstruit à la fin des hostilités pour assurer les liaisons
avec Hanoï. Témoin du passé, un char est planté en bord de piste, au milieu des
rizières. Un parfait point de départ pour découvrir la campagne environnante.
L’idéal est de s’y rendre au coucher du soleil, lorsque le tarmac devient le
point de rendez-vous des sportifs qui trottinent paisiblement sur les marques
blanches.
Douceur de vivre
Avec ses larges
avenues bordées d’arbres et sa circulation réduite, Dien Bien Phu est une ville
verte où il fait bon se promener. Un peu partout, il y a de vastes esplanades
sur lesquelles de petits commerçants ont installé quelques tables et chaises de
Lilliputiens, à l’ombre d’un frangipanier ou d’un flamboyant. En fin de
journée, les Vietnamiens s’y rassemblent pour siroter un jus de fruit en
grignotant des graines de tournesol.
Pas de «
western food » ici. Pas de restos « branchés ». Seulement de petites gargotes
locales où goûter les délicieuses soupes de nouilles pour trois fois rien. Vous
vous y retrouverez aussi bien assis à côté d’un jeune, portable high-tech à la
main, que d’un vieillard tranquille en pyjama de flanelle blanche. Ou encore
d’une femme aux vêtements multicolores, tenue traditionnelle des tribus
montagnardes qui peuplent la région.
Dans un pays où
le tourisme est une industrie bien huilée, Dien Bien Phu est une étape
originale pour ceux qui désirent sortir des sentiers battus. L’occasion de
découvrir un Vietnam authentique, qui trace sa propre route entre tradition et
modernité...