Pour la troisième fois, Hue, l’ancienne capitale vietnamienne, apporte sa part au patrimoine culturel mondial. Après la cité impériale et la musique de la cour, c’est cette fois-ci au tour de la littérature gravée sur l’architecture royale de recevoir les honneurs de l’UNESCO, qui l’a inscrit au patrimoine documentaire mondial dans le registre Mémoire du monde de la région Asie-Pacifique.
La littérature gravée sur l’architecture royale de Hue constitue le fleuron des compositions littéraires et poétiques des empereurs de la dynastie des Nguyen, le tout étant soit gravé, soit émaillé, soit mis en relief sur différents matériaux utilisés dans l’ensemble architectural de Hue, de 1802 à 1945. Cette littérature répond à tous les critères fixés par l’UNESCO en termes d’authenticité, de représentativité, d’unicité et de portée internationale. Vu Thi Minh Huong, vice-président du comité national chargé du programme Mémoire du monde pour la région Asie-Pacifique :
« Cette littérature est unique, le Vietnam étant le seul pays de la région à disposer d’une littérature gravée sur des architectures historiques. Au Japon ou en République de Corée, il y a eu des cours similaires à celle de Hue, mais aucune n’a utilisé ce type de procédé. »
Le palais Long An compte parmi les architectures les plus remarquables à Hue. C’est Thieu Tri, l’un des rois les plus connus de l’histoire pour son talent littéraire, qui l’a fait construire en 1845. Facile donc d’imaginer la richesse et l’originalité de ce palais qui passe pour être un musée de la littérature de la dynastie des Nguyen. Toutes les œuvres qui y sont gravées ont été signées par les empereurs, les mandarins ou les lettrés les plus éminents. Les deux œuvres les plus remarquables sont « Vu Trung Son Thuy » et « Phuoc vien van hoi Luong da man ngam » qui comptent, à elles deux, une bonne centaines de caractères chinois. Quant au palais Thai Hoa, qui est le plus somptueux de la cité impériale, il conserve 300 carrés dans lesquels des poèmes ont été gravés sur du bois ou du cuir émaillé. Les thèmes récurrents sont la souveraineté, l’indépendance nationale, l’aspiration à la paix, l’amour du pays.
En tout, on a recensé sur l’ensemble architectural de la cité impériale près de 3000 carrés contenant des poèmes gravés sur du bois doré, 146 autres carrés contenant des poèmes gravés sur du cuir émaillé et 78 autres carrés contenant à la fois des poèmes et des sentences parallèles mis en relief sur de la céramique. Leur point commun ? Chaque poème s’accompagne d’une peinture, chose qu'on ne trouve qu’à Hue. Phan Thanh Hai, directeur du Centre de préservation des vestiges de l’ancienne capitale de Hue :
« Les objets décoratifs ayant trait à la littérature d’autres pays sont essentiellement des panneaux transversaux et des sentences parallèles, autrement dit des biens mobiliers qui peuvent être déplacés. Ces objets sont en nombre limité. En revanche, c’est un style décoratif omniprésent dans la cité impériale de Hue. On le voit sur toutes les parois, autant à l’intérieur qu’à l’extérieur des édifices, ce qui donne l’impression que la littérature est omniprésente dans la cour huéenne. Certains se sont même demandé si les rois Nguyen avaient géré leur pays par la poésie. »
Malgré les affres du temps, ces œuvres littéraires restent intactes, d’où leur immense intérêt pour les historiens. Qu’ils apparaissent dans les palais, dans les sanctuaires ou les jardins, ces poèmes en caractères chinois constituent, outre leur valeur littéraire et historique, un patrimoine unique dont tous les Vietnamiens peuvent être fiers.