Avant
les semis, les Kho Mu ont l’habitude d’organiser une grande cérémonie pour
invoquer la pluie, cérémonie au cours de laquelle ils appellent l’âme de leurs
ancêtres à intercéder en leur faveur auprès du ciel, de la terre et des génies.
Mais cette fameuse cérémonie est aussi un beau témoignage de la spiritualité
animiste des Kho Mu.
C’est devenu une coutume. Début avril, dans le
village de Ten, un village du district de Muong Phang, a lieu l’invocation à la
pluie, qui donne lieu à une cérémonie fastueuse. D’après Quach Van Muôn,
le secrétaire du comité du Parti du village, bien que les temps aient changé,
les Kho Mu n’ont pas renoncé à leurs coutumes ancestrales. Cette invocation à
la pluie est inscrite dans leurs croyances : "Cette invocation existe
depuis longtemps. Autrefois, elle avait lieu avant les semis. C’est exactement
comme aujourd’hui ! C’est une manière de s’assurer des pluies abondantes,
gages de bonne récolte. Sinon, c’est le malheur assuré !"
Pour ce qui est de la date de la cérémonie, la
décision appartient à un patriarche qui jouit de l’estime de l’ensemble de la
communauté villageoise, et dont les oracles sont suivis à la lettre. Mais le
jour dit, pourtant, tout le monde part aux champs, comme à l’ordinaire. Luong
Van Khan, un habitant du village: "Ce jour-là, on va aux champs
et on fait des trous pour y semer le grain. Ce n’est qu’en fin d’après-midi,
lorsque tout le monde est rentré, que la cérémonie peut commencer. On abat des
porcs et de la volaille et on invite tout le monde à venir festoyer. C’est une
coutume qui doit être scrupuleusement observée, sinon les choses risquent de
mal tourner."
La coutume veut que l’invocation se fasse avec
l’ensemble de la communauté villageoise. Pour ce qui est des offrandes, rien de
compliqué : chacun donne ce qu’il a et contribue à mesure de ses propres
capacités. En tout cas, tous participent à la fête, c’est là un point
essentiel. Luong Thi Phuong : "S’il pleut trop, ce n’est pas bien.
S’il y a trop de soleil, ce n’est pas bien non plus. Il faut trouver le juste
équilibre. Actuellement, nos rizières ne nous donnent que 20 sacs de paddy.
Nous espérons que cette année, la production sera de 30 ou 40 sacs de paddy. Il
n’y a que comme ça que nous pouvons espérer réussir à joindre les deux bouts.
Et c’est pour ça que nous prions le ciel et la terre."
Après les rites, c’est l’heure de la danse, une danse
rythmée par les gongs. En général, les jeunes s’en donnent à cœur joie et
entraînent tout le monde dans leur sillage, enfants et vieillards compris.
Quant à la danse elle-même, elle est des plus simples : chacun danse comme
il l’entend, dans la liesse générale. Luong Thi Lua est rayonnante de joie :
"Cette cérémonie a lieu une fois chaque année. Ce n’est bien sûr pas la
seule, mais c’est la plus importante. Notre existence dépend des cultures. Il
est donc normal de prier pour que le temps soit propice à nos cultures. Nous
chantons et nous dansons pour que le ciel entende et exauce nos vœux."
C’est donc une nouvelle saison agricole qui s’ouvre
chez les Kho Mu du village de Ten. Avec cette invocation rituelle, ils prennent
un nouveau départ en se plaçant sous les meilleurs auspices. Les voilà armés
pour affronter toutes les difficultés à venir !