Situé non loin de la citadelle impériale de Huê, le village de Phuoc Tich vient d'être classé patrimoine national par le ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme. Demeures de charme conservées dans leur jus, population accueillante..., il n'en faut pas plus pour faire de Phuoc Tich un nouveau site touristique phare de la ville de Huê.
Comme tant d'autres villages vietnamiens, Phuoc Tich (commune de Phong Hoa, district de Phong Diên, province de Thua Thiên-Huê) vit principalement de l'agriculture. Un lieu paisible, à l'écart du temps, où les maisons aux toits de tuiles sont entourées de haies de théiers bien taillées. Selon Lê Trong Dao, un responsable local, "beaucoup d'entre elles ont plusieurs siècles d'âge. C'est le patrimoine bâti qui fait tout le caractère et l'attrait de Phuoc Tich".
Phuoc Tich a 500 ans d'histoire. Selon les registres généalogiques de plusieurs familles, le génie tutélaire du village se nomme Hoàng Minh Hung, un généralissime qui vécut sous le règne du roi Lê Thanh Tông (15e siècle). Un jour, alors que le guerrier et ses hommes rentraient dans leurs pénates après une bataille victorieuse contre des ennemis, en traversant la rivière Ô Lâu, à Huê, il fut attiré par un paysage pittoresque et décida de s'y installer. C'est ainsi qu'est né Phuoc Tich, qui veut dire "bénédiction accumulée".
Un double intérêt Il existe à présent à Phuoc Tich une trentaine de maisons anciennes, qui n'ont guère changé depuis leur construction. La plus ancienne a 200 ans, la plus récente est centenaire. "J'ai reçu cette maison en héritage, confie Mme Thanh Nga. Regardez ses colonnes et ses travées finement sculptées". Consciente de la valeur inestimable de ce patrimoine, elle prend soin de le protéger jusque dans ses moindres détails.
Le village de Phuoc Tich est également fier de son jaquier vieux de 1000 ans. À l'entrée du village, un arbre colossal au tronc verruqueux abrite sous son houppier un petit temple dédié à Confucius, lettré et philosophe chinois (551-479 av. J.-C.), dont la doctrine a fortement imprégné la culture vietnamienne.
Autrefois, le village était célèbre pour ses céramiques. Depuis 2 décennies, le métier périclite. Truong Công Kiêm, un des rares céramistes encore en vie, se rappelle avec regret le temps où jarres, vases, marmites, pots à chaux et bols estampillés Phuoc Tich se vendaient dans tous les marchés du Centre. Pendant cet âge d'or, la douzaine de fourneaux du village crachaient leur fumée âcre nuit et jour. Chaque matin, des bateaux venaient charger des tonnes et des tonnes de céramiques pour les acheminer vers des provinces du Centre comme Quang Binh, Quang Tri, Quang Ngai, Quy Nhon… "On trouvait même des céramiques de Phuoc Tich dans la citadelle impériale de Huê", rappelle non sans fierté le vieil artisan.
Le tourisme : un atout à exploiter Malgré ses 500 ans d'existence, le village de Phuoc Tich n'a commencé à se faire connaître qu'en 2003, suite aux travaux de recherche de l'architecte Hoàng Dao Kinh. Un séminaire spécifique a été organisé alors par les autorités de la province de Thua Thiên-Huê, où l'on a tenté de trouver pour ce village antique une voie de développement. Sa renommée établie, Phuoc Tich s'est orienté tout naturellement vers le tourisme. Le village figure maintenant dans la liste des destinations-phares de Huê. Dans le cadre du Festival culturel de Huê-2006, un circuit baptisé "Parfums d'un village d'antan" y a amené de nombreux curieux.
Début 2009, la sarl Viêt-Phap Services, chargée du suivi des projets réalisés à Thua Thiên-Huê avec le concours d'ONG, a pris l'initiative d'investir dans la construction d'infrastructures de base à Phuoc Tich pour y développer la formule touristique Homestay (hébergement chez l'habitant). Le principe est simple : au lieu de dormir à l'hôtel, les touristes sont hébergés chez des familles d'accueil. De nombreuses maisons sont prêtes désormais à loger des visiteurs. Cette forme de tourisme, qui permet de découvrir une localité de l'intérieur, a débuté avec un groupe de 18 Français. "Ils ont trouvé ici des maisons magnifiques, une ambiance sereine, de beaux paysages et, surtout, un accueil chaleureux de la part des habitants. Ils sont repartis ravis de leur séjour", confie Lê Thi Anh Tuyêt, directrice de la sarl Viêt-Phap Services. Et d'ajouter : "Une dizaine de groupes de touristes étrangers se sont inscrits pour venir prochainement passer des nuits à Phuoc Tich, en particulier au 4e trimestre".
De son côté, la Communauté française de la région Wallonie (Belgique), en collaboration avec l'Institut de la culture et des arts du Vietnam (ICA), a décidé de financer un projet de relance d'un atelier de céramiques. "Il s'agit en premier lieu de construire une faïencerie qui pourra produire des articles comme autrefois", explique Trân Dinh Hang, responsable d'ICA pour le Centre, qui souhaite collecter d'anciennes céramiques de Phuoc Tich pour "servir de modèle". Le prélude, espère-t-on, d'une renaissance de ce métier qui a fait la gloire du village. Les habitants de Phuoc Tich attendent avec impatience la première fournée prévue ce mois-ci dans le cadre du Festival des métiers traditionnels 2009 de Huê.
Nul doute qu'avec ses maisons pluri-centenaires et son métier artisanal prêt à renaître, le village antique de Phuoc Tich est promis à un bel avenir. À découvrir absolument !