La danse cultuelle then chez les Tày et les Nùng
Mettre à jour: 05 Mai 2017
Au Viet Nam, les Tày et les Nùng sont des ethnies parentes qui appartiennent au groupe linguistique Tày - Thaï. La danse then joue un rôle important dans leur vie culturelle. Elle se joue lors des fêtes, des obsèques et des mariages.  

Les Tày et les Nùng vivent souvent mêlés dans les provinces de la haute région, surtout Cao Bang, Lang Son, Thai Nguyên, Bac Can (Nord). Leur vie spirituelle et sociale est fortement marquée par le then qui désigne l’ensemble des puissances surnaturelles, esprits, fantômes génies, qui ont créé et gouvernent l’univers.

Par extension, le mot then peut désigner : le culte du then, culte animiste autochtone teinté de bouddhisme et d’autres croyances. Il vise l’exorcisme, la guérison des maladies, la bénédiction surnaturelle... ; la célébration de ce culte alliant les rites, le chant, la musique et la danse ; les officiants féminins (bà then) ou masculins (ông then) plus ou moins sorciers. La danse then fait donc partie intégrante d’une manifestation religieuse et artistique folklorique très caractérisée.

Le dàn tinh donne le ton

La musique joue un rôle essentiel avec comme instrument prédominant le dàn tính (tính tâu), dont la caisse à résonance taillée dans une écorce de calebasse est couverte de bois mince et munie d’un long manche. Un chapelet de clochettes accompagne l’instrument. Le chant, très harmonieux, fascine les participants aux cérémonies, surtout les femmes.

Il y a toute une gamme de cérémonies then : le Dê Lâu raconte les pérégrinations dangereuses des mortels qui acheminent les offrandes au Ciel, - le Khai Bjoóc est la vente des fleurs aux nymphes des eaux, - le Lin en où les hirondelles d’or conduisent les âmes des morts au séjour céleste, - le Luon Hai qui invite Dame Lune à descendre au monde pour protéger la récolte, etc.

La cérémonie câp sac (ou lâu then) est l’une des plus importantes. Elle présente le plus de rites, et toujours des danses accompagnées de chant. Les nombreuses danses se ressemblent par leur caractère cultuel. Les principales sont le múa châu (danse pour hommages cultuels), le múa tán hoa (danse d’épandage de fleurs), le múa Sluông (danse Sluông).

Le mot Sluông pourrait désigner la danse elle-même, ou bien la danseuse, ou bien une personne qui connaît bien les voies fluviales, et par extension, le serviteur, le coolie porteur des objets du sorcier (ou de la sorcière) then.

La danse pour hommages culturels (múa châu) est exécutée quand il s’agit d’emprunter la voie terrestre (tàng bôc) pour aller présenter des offrandes à l’Empereur de Jade du ciel, aux chefs militaires, aux mandarins, civils célestes, etc.).

Si c’est la voie fluviale (tàng nam), c’est la danse Sluông avec les airs Khao Sluông, xuôi Sluông... et les mouvements de rameuse.

La danse d’épandage de fleurs (tán hoa) clôture la cérémonie : on distribue des offrandes à la famille hôte et des fleurs à la forêt.

Une danse qui rythme le quotidien

Danse rituelle, la danse then reflète cependant des activités de la vie quotidienne du peuple travailleur (mouvements pour ramer, laver la barque, tirer la corde, abattre un arbre, danse avec un fichu, une palanche, un éventail...). Elle mime aussi le combat (danse avec bâton, épée...).

Le fichu carré, rouge ou blanc, suit les mouvements gracieux du bras et de la main de la danseuse pour planer au-dessus de sa tête, de son épaule, de son dos. L’éventail qui se déploie et se ferme à volonté peut servir tantôt d’épée, tantôt de rame. Le dàn tính peut être joué en dansant alors que le chapelet de clochettes bat la mesure. Le bâton bat aussi le rythme en assénant des coups sur le plancher ; deux bâtons tournent dans l’air, s’entrechoquent et produisent des sons précipités et joyeux...

La danse then est exécutée devant un autel, sur le parquet de bambou des maisons sur pilotis. L’espace étant restreint, les danseuses ne peuvent se permettre des mouvements trop amples, sauts en l’air, entre-chats...

N’empêche que certaines figures sont attachantes, tel la lông ma : la danseuse s’agenouille, s’incline en avant jusqu’au parquet, décrit avec son buste un cercle autour d’elle, le dos rasant les lattes de bambou. Dans une atmosphère sacrée, ivres d’encens, de sons et de couleurs, même des danseuses then de 50 ans ou plus paraissent toutes jeunes tant elles sont transfigurées par l’illusion de flotter entre Ciel et Terre.
 

CVN