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Porte d'entrée traditionnelle d'un village des Kinh |
C’est sans aucun doute à l’échelle de ses villages que l’on découvre réellement ce qu’est le Vietnam. Appelé «làng» par les Kinh et «bản» par les minorités ethniques du Nord, le village est un groupe d’habitations rurales, assez conséquent pour avoir une vie propre, assurer les fonctions administratives et religieuses élémentaires, et entraîner un sentiment de communauté. C’est également un espace vivant où se nourrit l’âme de chacun de nous.
Les chemins qui sillonnent le village ne sont ni trop larges ni trop étroits, de sorte que les chariots à bras ou les chars à buffles peuvent y circuler aisément. De même que le banian séculaire ou la frêle barque amarrée près de l'embarcadère, la haie de bambou caractérise le village traditionnel. Les villageois y voient une protection contre les malfaiteurs, les envahisseurs et les tempêtes. Non loin de ce rempart naturel, se trouve la porte d’entrée du village, qui en manifeste la puissance autant qu’elle le délimite.
La porte d'entrée du village est toujours large ouverte. Construite en brique, elle possède trois entrées : une entrée centrale, monumentale, et deux entrées latérales, plus petites. Normalement, chaque village possède deux portes. La première porte, la principale, donne au sud-est, là où le soleil se lève et où les vents sont favorables. Elle accueille les bonnes choses, les bénédictions et les bonheurs. Quant à la seconde porte, elle est orientée à l’ouest, où s’éteint le soleil. Réservée aux convois funèbres, elle symbolise la séparation entre le monde des vivants et celui des morts.
À Hanoi, urbanisation galopante oblige, la physionomie des villages traditionnels a beaucoup changé. Mais nombre de portes villageoises résistent encore aux affres du temps sous l’ombrage protecteur des banians séculaires. Il suffit, par exemple, de se rendre au village de Duong Lâm, en banlieue, pour pouvoir contempler une porte datant de 1553. Lê Quang Ngoc, architecte de son état : "C’est tout à fait bucolique au fond. Imaginez cette porte à côté d’un banian séculaire, tout près d’un étang de lotus, avec un chemin qui serpente tout autour. C’est vraiment la parfaite image d’estampe!"
Les étangs et les puits, autres symboles de la campagne, font partie intégrantes de la vie des villageois qui y voient un miroir dans lequel se reflète leur existence. Trân Minh Nhuong, folkloriste : "On peut en trouver partout dans le delta du fleuve Rouge, des puits anciens ! Ils sont, soit en terre battue, soit en pierre, soit en latérite. Dans les lieux de culte, le puit est souvent percé devant une façade de l’édifice dont il est inséparable."
Chaque village a son Dieu protecteur qui est vénéré sur son autel dans la maison communale. L'édifice principal est souvent une grande maison à quatre pans de toiture, abritant de nombreuses sculptures populaires. Lê Quang Ngoc a dit : "La maison communale se trouve au centre du village. C’est à son importance que l’on peut jauger de la prospérité des villageois. En général, les familles riches y contribuent beaucoup."
Le village est traversé par un lacis de ruelles. Il n’est pas rare, pour rentrer chez soi, d’emprunter un raccourci, c’est à dire de passer par la cour d’un voisin sans que celui-ci s’en offusque. Et d’ailleurs, au Vietnam, la vie villageoise est éminemment communautaire.