On
n’exaltera jamais assez le áo dài, cette tunique traditionnelle dont les
Vietnamiens, et surtout les Vietnamiennes, sont si fiers. Savez-vous que ce
vêtement est apparu pour la première fois il y a plusieurs milliers d’années
déjà ? Allons aujourd’hui à la redécouverte de cet habit en soie douce et
colorée qui n’en finit pas de nous séduire.
La
première image du áo dài aurait été trouvée sur la face gravée d’un tambour de
bronze et sur des objets de Dong Son, cette culture protohistorique remontant
au premier millénaire avant Jésus Christ. Mais… restons dans l’histoire
récente. Au début du 20è siècle, les citadines vietnamiennes portaient des
tuniques à cinq pans : deux cousus entre eux à l’avant, deux à l’arrière, et un
cinquième à droite, derrière les deux pans avant. Les quatre pans
principaux symbolisaient les quatre parents proches de la femme : ses propres
parents et ceux de son mari. Le cinquième et dernier pan, c’est elle-même. Ce
áo dài ancien comprenait également cinq boutons, équivalant aux cinq
principales qualités éthiques qu’un homme, ou une femme, doit avoir, selon
Confucius, à savoir : humanité, politesse, fidélité, intelligence et
crédibilité. Les bras et la partie supérieure du vêtement collaient au corps
alors que la partie inférieure s’élargissait, sans qu’il n’y ait de pince au
niveau de la taille. La bande de bordure latérale mesurait en moyenne 80 cm et
le col était de 2 à 3 cm. Le áo dài, tel qu’on le voit aujourd’hui, a subi
maintes modifications depuis, comme l’explique la peintre Đoàn Thị Tình :
“Le áo dài des Vietnamiennes a pris sa forme actuelle entre 1950 et 1975.
Depuis 1975, il a fait l’objet de nombreuses variations. En 1980, l’Etat a
commencé à s’intéresser à cet habit et c’est à ce moment-là qu’on a eu les
premiers défilés de áo dài. Depuis lors, le áo dài des Vietnamiennes a écumé
toutes les scènes du monde.”
A
la différence du kimono japonais ou du hanbok sud-coréen, le áo dài vietnamien
allie tradition et modernité. Son utilisation ne connaît pas de limite
d’endroit ou d’occasion. Les femmes peuvent le porter aussi bien au bureau ou à
l’école que lors de sorties ou de réceptions solennelles. Il se porte avec un
pantalon en soie ou en tissu doux et s’accommode aussi bien d’une paire de
babouches, de sabots, ou de simples chaussures. La partie supérieure colle
toujours au corps mais les deux pans descendent en toute liberté et en douceur
sur les jambes larges du pantalon. Un hymne à la féminité, nous dit le professeur
Ngô Đức Thịnh, vice-président de l’association des arts folkloriques d’Asie :
“Le áo dài est discret tout en mettant en relief les magnifiques courbes du
corps féminin. Les Vietnamiennes doivent en partie leur charme à cet habit
original.”
Le
áo dài est un habit des plus personnalisés, car il est confectionné à l’unité
pour une personne unique. Les perfectionnistes rejettent catégoriquement toute
idée de production massive. Quand vous vous faites faire un áo dài, le tailleur
prend plusieurs mesures et vous devez essayer au moins une fois avant qu’il
finisse la confection. Pour Trịnh Bách, chercheur culturel de son état, le áo
dài est typiquement vietnamien : “Certains s’interrogent sur l’origine du áo
dài vietnamien, croyant que c’est un dérivé de la tunique chinoise. Faux
! Les Vietnamiens se doivent d’être fiers de l’originalité de leurs ascendants
qui se sont démarqués des Chinois dans la façon de boutonner. Depuis des
milliers d’années déjà, les Vietnamiens boutonnent leur tunique à gauche,
jamais à droite comme les Chinois.”
Gauche
ou droite, le áo dài a toujours été une source d’inspiration intarissable pour
les poètes, les écrivains et les compositeurs. Elément indispensable des
concours de beauté nationaux, il a été introduit au concours Miss Terre qui
s’est tenu en 2007 à Nha Trang, au Vietnam. Les créateurs de mode, de plus en
plus nombreux à vouloir rénover cette tunique traditionnelle, n’en finissent
pas d’expérimenter de nouvelles matières, de nouvelles coupes et de nouvelles
décorations. Le áo dài a suivi les femmes vietnamiennes partout dans le monde,
comme une partie de la culture et de l’âme vietnamiennes.