Les Lolo préservent une multitudes de fêtes traditionnelles, aussi variées qu’intéressantes : la fête du printemps, la fête de la récolte du riz et surtout, le rituel d’invocation à la pluie, qui donne lieu à des retrouvailles bien méritées après des mois de dur labeur.
Sans ce rituel d’invocation à la pluie, pas de récolte abondante... Et sans récolte abondante, pas de prospérité, ni de bonheur... Autant dire que cette cérémonie, qui est organisée au cours du troisième mois lunaire, est absolument indispensable aux Lolos. Lo Sy Pao, chef du hameau de Sung Pa A, un hameau du district de Meo Vac : « Si les villageois se sentent menacés par la sécheresse, ils organisent un rituel d’invocation à la pluie. Ca tombe souvent le treizième jour du troisième mois lunaire. A ce moment-là, tout le monde doit apporter des offrandes pour les forces célestes. »
Des offrandes... Oui, mais lesquelles ? Un coq, deux chiens, une épée, de l’alcool, des papiers votifs, un tube de bambou dans lequel sont placés des bâtonnets d’encens feront l’affaire. Mais le tout doit être offert au son du tambour et de la viole à deux cordes, les deux instruments fétiches sans lesquels les offrandes ne sauraient être agréées par les génies.
Le tambour, donc. Il s’agit en fait d’un tambour de bronze, symbole de l’univers pour les Lolos, et intercesseur auprès des forces célestes. Aussi ressort-on les « mo danh », les « tambours célestes » pour accompagner l’invocation. Il faut savoir d’ailleurs que ces tambours fonctionnent par paires, avec un tambour « masculin » et un tambour « féminin ». Pour ce qui est de la viole à deux cordes, force est de constater que les Lolos voient grand lorsqu’il s’agit d’entrer en contact avec les divinités : la leur est quatre fois plus grandes que celles que l’on trouve d’ordinaire dans les autres ethnies. Elle émet donc des sons beaucoup plus graves, naturellement.
Devant un grand autel érigé pour la circonstance devant les rizières, le maître de rituel invite les génies à descendre dans ce bas monde en y apportant des pluies abondantes. Lo Sy Pao, toujours: « Les rites n’ont lieu qu’à l’extérieur, jamais à la maison. Chaque famille envoie un représentant en tenue traditionnelle, qui apporte du poulet, du riz gluant, de l’encens et des papiers votifs. Sous l’égide d’un maître de rituels, tout le monde psalmodie des prières à l’intention des génies et des défunts. Faute de quoi, la pluie ne tombera jamais.»
Ensuite, tout le monde se rassemble autour de l’autel. Comme pour manifester la gratitude de toute la communauté, le maître de rituels invite les quatre génies qui règnent sur les quatre coins du monde à venir festoyer avec toute l’assemblée.
Il faut savoir que si la cérémonie se passe bien évidemment en présence des Lolos, des personnes appartenant à d’autres ethnies peuvent tout à fait être conviées à y assister. Mme Can Thi Quy habite le hameau de Sung Pa A :
«Chaque maisonnée est représentée, qu’elle soit de l’ethnie Lolo ou non. C’est très important de préserver ce rituel d’invocation à la pluie. Comme ça, les jeunes savent mieux d’où ils viennent, quelles sont leurs origines. Les jours précédant l’événement, on se réunit pour répéter les airs folkloriques et les danses traditionnelles.»
La cérémonie elle-même est bouclée au bout de deux heures. Et comme tout finit en fête chez les Lolo, c’est alors le moment des agapes et des réjouissances. On trinque, on mange, on danse... Après le sacré, le profane !