Lâm Du Xênh est un collectionneur d’antiquités, domicilié dans la province de Quang Ngai, au Centre. Parmi tous ses objets, les épées de l’époque des Tây Son prennent une place toute particulière, sur ses étagères, mais aussi dans son cœur.
«Il y a une semaine, j’ai offert des épées de Tây Son à des musées de huit provinces du Sud. J’ai dû verser beaucoup d’argent pour les acquérir mais je suis content de les offrir», explique Lâm Du Xênh. Et d’ajouter qu’«il faut ramener les épées de Tây Son sur leur terre natale».
Fin novembre 2011, M. Xênh a offert 21 épées au musée de Quang Trung, dans le district de Tây Son (province de Binh Dinh, Centre). Puis, d’autres à celui de l’Armée populaire, à des musées des provinces de Lâm Dông (hauts plateaux du Centre), de Binh Dinh, de Vinh Long (Sud) et de Thua Thiên-Huê (Centre). «Je veux que ces épées soient présentes dans toutes les régions du pays», a-t-il confié.
Châu Kinh Tu, directeur du musée de Quang Trung, a fait savoir : «À la nouvelle que Lâm Du Xênh voulait faire don à notre musée des épées des insurgés de Tây Son, nous avons effectué des examens pour en certifier l’authenticité. Et il s’est révélé que toutes sont semblables à celles offertes en 2007 par la Compagnie de la construction Minh Duc à notre musée».
«Cette passion pour les épées des Tây Son a commencé par hasard», a expliqué M. Xênh, en rappelant le récit du rachat d’un premier lot de 250 épées il y a près de cinq ans, trouvées par un récupérateur de métaux à An Khê (province de Gia Lai, hauts plateaux du Centre). Ce lot était composé à 98% d’épées de 30 à 50 cm (en comptant le manche). Enfouies depuis plus de 200 ans, elles étaient bien rouillées mais les lames avaient gardé leur forme. Les épées de cette époque se caractérisent par un manche en cuivre dont la garde a la forme d’une fleur d’abricotier. L’extrémité du manche est percée d’un trou pour passer une cordelette (pas de fourreau).
Au jardin Dinh, au-dessous du musée de Quang Trung, où la femme capitaine Bùi Thi Xuân exerçait ses éléphants, les habitants ont trouvé une épée. À la citadelle impériale de la dynastie des Tây Son, baptisée Hoàng Dê, dans le district d’An Nhon (province de Binh Dinh), on a aussi découvert des forges où les insurgés de Tây Son façonnaient leurs armes. «Les découvertes du collectionneur Lâm Du Xênh à An Khê montrent que les lieux historiques de la dynastie des Tây Son renferment encore de nombreux objets. Il suffit juste de creuser !», estime Nguyên Thi Thin, directrice adjointe du musée de Quang Trung.
«Je suis très ému devant ces épées. Je les imagine aux mains des insurgés. Les offrir à des musées de toutes les régions du pays, c’est pour moi un moyen de mieux faire connaître aux habitants, notamment aux jeunes, une époque glorieuse de leur histoire», a confié M. Xênh.
À savoir pour terminer qu’il a refusé bien des propositions alléchantes de collectionneurs étrangers, et qu’il compte ouvrir chez lui son propre musée où neuf épées seront exposées.
Histoire de l’époque des Tây Son
Tây Son est le nom donné à trois frères, Nguyên Nhac, Nguyên Lu et Nguyên Huê, qui a lancé une insurrection des paysans à la fin du XVIIIe siècle.
Originaires de Tây Son, un village situé près de Qui Nhon, ils se révoltent en 1771 contre les seigneurs du Sud, les Nguyên. Aidés par les Trinh, seigneurs du Nord et rivaux de ces derniers, ils prennent d’abord la ville de Qui Nhon, qui devient leur capitale, puis de Gia Ðinh (actuelle Saïgon) et enfin la capitale, Huê.
Les membres de la famille Nguyên sont tous tués, à l’exception du jeune prince Ánh, âgé de 16 ans, neveu du dernier seigneur Nguyên, qui se réfugie dans le delta du Mékong, puis obtient l’appui des Français par l’intermédiaire du prélat Pierre Pigneau de Béhaine.
Sous le nom de Quang Trung, Nguyên Huê se proclame empereur en 1788, mettant fin de fait au règne de la dynastie Lê, ainsi qu’à la domination des Trinh dans le Nord. En 1789, ils repoussent les Chinois, appelés à l’aide par les Lê, à la bataille de Đông Đa. En 1792, Quang Trung meurt sans héritier, déclenchant ainsi une guerre de factions au sein des partisans des Tây Son. Le désordre permet au prince Nguyên Ánh de reconquérir le Sud, tenu par Nguyên Lu, le dernier et le moins compétent des trois frères.
Leur dynastie prend fin en 1802, quand Nguyên Ánh se proclame empereur sous le nom de Gia Long.
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